Arbitraire et arbitrages. Les zones grises du pouvoir (XIIe-XVIIIe siècles).

Arbitraire et arbitrages. Les zones grises du pouvoir (XIIe-XVIIIe siècles).

Martial d’Auvergne, Les vigiles de Charles VII, 1484, Bibliothèque nationale de France, manuscrit français 5024, fol. 299

Du 9 au 11 mai 2022

Colloque international du GRHS

Dans les sociétés occidentales contemporaines entièrement régies par le droit et la loi, par les constitutions et les chartes, et envahies par une normativité galopante, l’idée d’un arbitraire du pouvoir est pour le moins surprenante. Le terme d’« arbitraire », entendu comme ce qui n’est fixé ni par le droit ni par la loi, reste le plus souvent connoté négativement, encore que, sous le vocable de « discrétion », il se charge d’une valeur morale d’intelligence, de compétence ou de sensibilité. Associé à celui d’« arbitrage », il caractérise non seulement le travail des juges mais aussi la gestion de tous les pouvoirs dans les zones grises de leur exercice.

Ce colloque international propose une lecture comparative des pratiques arbitraires/arbitrales dans le champ du droit privé, du droit pénal et de l’exercice du pouvoir public. Son objectif est d’observer les limites posées par le droit, la coutume ou la morale à l’exercice des pouvoirs, dans l’espace européen, entre le XIIe et le XVIIIe siècle. Plus spécifiquement, il fonde sa réflexion sur la distinction entre l’arbitraire des normes et celui des pratiques ; sur les différentes fonctions de l’arbitraire dans la conduite du gouvernement ; sur les résistances qu’on lui oppose et sur les valeurs politiques, sociales et culturelles qui lui opposent des garde-fous.

La pertinence d’une telle réflexion, dans le contexte contemporain, semble aller de soi. Des questions aussi diverses que l’émergence des réseaux sociaux et la culture de l’annulation (cancel culture), le déboulonnage des statues ou encore, dans la plus chaude actualité, les débats sur la pertinence du port du masque durant la pandémie du nouveau coronavirus, invitent à approfondir la réflexion sur les potentialités néfastes d’un certain arbitraire dans les zones grises du droit comme dans les incertitudes de la science, aussi bien que sur la pertinence renouvelée à tous les échelons de la société, et non plus seulement chez les élites traditionnelles du pouvoir, de l’exercice d’un bon jugement, entre liberté et contraintes.

Ce colloque interdisciplinaire et international et ses activités annexes s’adressent ainsi tant aux universitaires (chercheurs expérimentés et jeunes chercheurs) et aux étudiants des trois cycles, qui pourront approfondir leurs connaissances disciplinaires et méthodologiques et échanger avec les participants du colloque, qu’à un public averti, hors du strict cadre académique. Ce dernier y sera invité à découvrir comment l’histoire permet d’éclairer l’actualité et de comprendre en les contextualisant certains des grands enjeux contemporains.

Programme final ___

Lundi 9 mai

9 h : accueil des participants

9 h 30 : Introduction (Benjamin Deruelle, UQAM, Michel Hébert, UQAM, et Pascal Bastien, UQAM)

10 h : Panel 1, Justice, grâce et rémissions (présidence : Fanny Cosandey)

  • Emmanuel Berger (Instituto Universitario de Lisboa), « De l’arbitraire des juges à l’intime conviction des jurés. Étude sur la transformation d’une pratique judiciaire d’Ancien Régime à l’époque de la Révolution française. »
  • Benjamin Deruelle (UQAM) et Quentin Verreycken (Université catholique de Louvain – Université Saint-Louis de Bruxelles), « Père du peuple ou roi de guerre ? Aribtraire et arbitrage de la grâce des gens de guerre dans le royaume de France, 1460-1559 »
  • Emmanuel Gérardin (Université de Strasbourg), « Arbitrer l’arbitraire entre Empire et Royaume : les lettres de rémission des ducs de Lorraine, instrument d’une indépendance juridictionnelle (1473-1633). »

12 h : Lunch

14 h : Panel 2, Justice, grâce et rémissions (suite) (présidence Bruno Lemesle)

  • Nicolas Handfield (UQAM – Université Paris I Panthéon-Sorbonne), « Entre les tribunaux et le Spießgericht : l’arbitrage monarchique à l’épreuve des lansquenets. »
  • Élisabeth Lusset (Lamop, CNRS, Paris), « Arbitraire et arbitrages à la Pénitencerie apostolique au temps des réformes monastiques (XVe-XVIe siècles) »
  • Olivier Spina (Université Lyon 2), « Till that I know your furter plesure what I shuld do in this matter. Thomas Cromwell et ses interprétations de l’acte de trahison de 1534 (Angleterre, 1534-1540) ».

16 h : Pause

16 h 15 : Panel 3, Arbitraire, arbitrages et zones grises des pouvoirs (présidence Pascal Bastien)

  • Steven Bednarski (University of Waterloo, Ontario), « Draining Local Authority: The Grey Zone between Local and National Interests in Late Medieval English Flood Management. »
  • Thomas Boullu (Université de Strasbourg), « Les arbitrages fiscaux et douaniers du contrôle général des Finances (XVIIe-XVIIIe siècles). »

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Mardi 10 mai

9 h : Panel 4, Arbitraire, arbitrages et zones grises des pouvoirs (suite) (présidence Kouky Fianu)

  • Martine Charageat (Université de Bordeaux Montaigne), « Le desaforamiento ou la fabrique arbitraire d’une justice d’exception en Aragon (XIIIe-XVIe siècle) »
  • Josep Capdeferro (Université Pompeu Fabra, Barcelone), « Le Canceller de la Catalogne, entre l’arbitrage et l’arbitraire (XVIe-XVIIIe siècle). »

10 h 30 : Pause

11 h 00 : Panel 5, Arbitraire, arbitrages et zones grises des pouvoirs (suite) (présidence Jean-Philippe Garneau)

  • Alexandre Lepesteur (Université Rennes 2), « Sortir des guerres de la Ligue en Bretagne par l’arbitraire et l’arbitrage ? Le parlement rennais et l’application de la politique royale »
  • Valentin Grandclaude (UQAM – Université Rennes 2), « Des pratiques d’arbitrage aux pratiques arbitraires : l’apparition d’un nouveau paradigme de gestion des conflits au sein des armées françaises au temps des guerres d’Italie (1494-1559) ? »

12 h 30 : Lunch

14 h : Panel 6, Pouvoir d’État et volonté populaire (présidence Josep Capdeferro)

  • Jean-Yves Champeley (Université Savoie Mont Blanc) et Samy Méchatte (Université Paris I), « Les placets des sujets savoyards et les projets de l’État monarchique centralisateur (Savoie au XVIIIe siècle). »
  • Fanny Cosandey (EHESS, Paris), « Arbitrer les conflits. Un exercice de la toute-puissance monarchique. »
  • Michel Hébert (UQAM), « Le recours au prince comme arbitre suprême dans la supplique urbaine (Provence, XIVe-XVe siècles) ».

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Mercredi 11 mai

10 h 00 : Panel 8, Pouvoir d’État et volonté populaire (suite) (présidence Michel Hébert)

  • Élodie Lecuppre-Desjardin (Université de Lille), « Affaires de cœur, affaire de cour : quand le prince use de son « bon plaisir » pour forcer au mariage dans la Grande Principauté de Bourgogne à la fin du Moyen Âge. »
  • Marie-Laure Legay (Université de Lille), « Gouverner par arrêts : la décision arbitraire dans la France des Lumières. »
  • Jérôme Loiseau (Université de Bourgogne), « Tyrannie fiscale et habilitation des États provinciaux (vers 1750 – vers 1780): Bourgogne, Bretagne et Languedoc »

12h00 : Lunch

14 h : Panel 9, Approches intellectuelles et morales (présidence Martine Charageat)

  • Thibault Desmoulins (Université Paris II Panthéon-Assas), « Une théorie générale de la justice : la conception d’un système judiciaire fondé sur l’arbitraire (XVIe siècle) »
  • Bruno Lemesle (Université de Bourgogne), « L’arbitraire du juge, des canonistes aux lettres papales (XIIe siècle-début du XIIIe). »
  • Olivier Contensou (Université Laval), « Arbitraire royal et arbitrage républicain : la genèse et l’évolution de la catégorie de despotisme. »

16 h : Pause

16 h 15 : Conclusions (Claire Dolan, Université Laval)

UQAM,
Salle des boiseries, J-2805.
1455 rue Saint-Denis,
Montréal, H2L 2C4

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